Cette page reprend de larges extrait du numéro 18 de février 1985 de « Jazz dixie/swing », la revue trimestrielle de Raymond Fonsèque. 189 av Fernand Prévost 27160 Breteuil-sur-Iton
Site parlant de cette revue :

Dans la perspective d’une « histoire du Jazz-Club Moulinois », nous publions cet extrait de «Jazz Dixie/Swing» et en retrait et en italique les précisions apportées par Jean-Pierre Rougeron.
Si vous avez contribué à l’histoire du Jazz-Club, merci d’apporter également votre contribution.
Le Jazz Club Moulinois par Jean Vastra
Comme je l’avais laissé entendre dans le Jazz Dixie/Swing de mai 1997, je viens enfin vous présenter une association de pratique et de promotion du jazz probablement unique dans le centre de la France: le Jazz Club Moulinois, fondé en 1979 par le pianiste Jean Ciavatti, le batteur Michel Poix, dit «Pix» et le contrebassiste Jean-Pierre Thomas, qui, un beau jour lancèrent un tel appel au swing que bientôt une quarantaine de musiciens sevrés rappliquèrent de tous les coins du Bourbonnais. On avait déjà un effectif, mais pas de local ! Il n’est pas exagéré de qualifier d’«héroïques» les premières années de ce club. Après avoir lassé le directeur du théâtre de Moulins, ces amateurs avides de répétitions et peut-être de gloire squattent l’auditorium de la Bibliothèque municipale,
Le conservateur de la bibliothèque de l’époque s’appelait Dominique Frasson-Cochet et jouait du sax ténor et aussi du soprano. C’était un fan de Coltrane. C’est grâce à lui que nous pûmes faire nos première répétitions à l’auditorium.
s’imposent plus ou moins dans d’autres associations quand ils ne «déménagent» pas dans une chapelle désaffectée
Rue des remparts. Pour ma part, je suis venu au Jazz-Club pour la première fois le 4 juin 1980.
ou même un entrepôt de couronnes mortuaires.
Il s’agissait d’un entrepôt à La Madeleine appartenant à un fleuriste. Au moment de la Toussaint nous jouions gaiement parmi les couronnes mortuaires ! Le local n’était pas chauffé évidemment et je me rappelle y avoir joué avec des gants ! (et malgré cela, y avoir attrapé l’onglée !) Ensuite nous allions manger des Frites chez Michel, place aux foires
Ils croient enfin apercevoir un arc-en-ciel car la ville leur offre une cave dans un immeuble
Il s’agissait d’une cave de l’ancienne bourse du travail (aujourd’hui parking, entre la bibliothèque et la salle des fêtes) Nous avons coulé une dalle puis peint le plafond et les murs en bleu et le sol en vert. Il est exact que FR3 vint pour l’inauguration. Le « New » passa sur FR3 auvergne (télé) au début 1982 (un quart d’heure. Il existait une cassette de l’événement, mais je ne l’ai jamais eue. Je l’ai vue. Tout le mond avait une tête pas possible car la veille nous avons joué pour les internes de l’hôpital. La soirée s’est terminée vers les deux heures du matin et à huit heures nous étions dans les studios à Chamalières. Je me souviens que les gardiens de l’entrée ne voulaient pas nous laisser entrer, nous prenant pour des clochards !
en sursis de démolition. Malgré cette épée de Damoclès, ils se mettent tous au travail pour rendre ce local accueillant. Ils sont même récompensés de leurs efforts par un passage de trois secondes et cinq dixièmes sur FR3 Auvergne ! Juste avant la démolition ! Heureusement, il leur fut possible de trouver refuge dans les ruines d’une ancienne caserne de cavalerie
Il s’agissait d’un local dans l’ancien quartier Villars, à cette époque en cours de démolition (1983). Le premier concert du J.C.M. eut lieu le 6 mai 1981 au théâtre de Moulins. Il y avait quatre formations qui se succédèrent sur scène. Le « New », le «Big-band”, le “quatuor de trombones” et une formation moderne avec Frasson-Cochet et Charasse (décédé depuis).
jusqu’à ce que finalement, grâce à la ville une fois de plus, ils obtiennent le droit de s’installer dans la fameuse cave de l’Hôtel Moret, leur siège actuel. Il faut dire qu’à partir de 1980, le tromboniste Bruno Chatard s’était joint à ce trio fondateur et ce « quartette » dynamique réussit, par l’exemple, à mobiliser le dévouement de tous pour effectuer les démarches et trouver les financements nécessaires à la restauration de cette cave et à son aménagement.
En 1982, nous avions en plus un quintet de saxes (le père de Bruno Chatard au saxo basse – emprunté à la Lyre Moulinoise – Gérard Charasse au Baryton, Michel Sénac au ténor, moi à l’alto et Frasson-Cochet au soprano. C’est Bruno Chatard qui faisait les arrangements et dirigeait les répétitions.
L’inauguration eut lieu en 1984 et bien des choses se sont passées depuis.
Un des concerts les plus importants du « Big-band » se déroula à la maison des jeunes et de la culture de Vichy le 4 mars 1983 (j’ai la cassette). Il y eut deux formations pour l’inauguration de la cave (novembre 1984) : un groupe New «Les alligators», je crois, avec une chanteuse excellente et un quartet moderne (piano, basse, batterie, et un soprano extraordinaire, un jeune allemand complètement défoncé ce soir là).
Au point de vue de l’activité musicale proprement dite, deux périodes se dégagent ; jusqu’à la fin de la décennie 80 elles est très présente, puis elle sera en régression, avant de repartir de plus belle depuis quelques années. La première formation avait fait ses débuts dans un café du Champ de Foire, à Moulins, avec Serge Bérard, dit « Béru » au cornet,
Je revois le Serge un jour où on jouait je ne sais plus où, mais pas très loin de Moulins – heureusement pour la suite – ouvrir son étui et constater que le cornet était resté à la maison !
qui plus sera cofondateur du Jazz Club de Clermont-Ferrand avec José Montpeyroux ; il y avait également le docteur Gérard Lefebvre
Le bon docteur avait une fabuleuse collection de disques et nous invitait parfois pour une audition, navré qu’il était de notre ignorance crasse du jazz d’antan.
(« Doc » avait, parait-il « boeufé » avec Claude Luter, saluons sa mémoire). Il y avait encore Bruno Chatard au trombone, Jean Pierre Bernard au banjo, Jean-Pierre Thomas à la contrebasse, Michel Poix à la batterie (lui aussi disparu aujourd’hui) et, au saxo soprano un fan de Sidney Bechet et qui le reste, Jean-Pierre Rougeron (cet instituteur de la Nièvre ne manque jamais d’initier ses élèves à la pratique du jazz, quel que soit l’âge de ceux-ci). Il m’a beaucoup aidé dans la rédaction de cet article. Cet orchestre traditionnel s’est évidemment fait connaître dans tout le Bourbonnais et même dans le Nivernais et en Auvergne, sous le nom de « New Orleans Jazz Fiddlers ».
Plus tard, à la suite de départs ou autres contingences, la cave du passage Moret accueillera d’autres musiciens : Michel Viard (piano et trombone),
Michel Vird se présente dès les débuts de la formation New (septembre 1980) en tant que trompettiste ! Il apparut rapidement qu’il était meilleur au piano. Il quitte la formation comme trombone et joue dans des orchestres du Midi actuellement (région de Toulon)
Sylvain Andrianony (banjo et chant), Patrick Mazurier (piano et banjo),
Le « Pat » vint au Jazz-Clubà la suite du concert de mai 1981. Il remplace Viard au piano, celui-ci se consacrant au Big-band. Vers 85-86, il restaure une péniche à Decize qui devint le rendez-vous de bien des jazzmen locaux, puis il fit venir des petites formations de renom. Malheureusement son sens des affaires n’était pas à la mesure de son talent de pianiste. Il joue aujourd’hui dans un orchestre vers Saint-Malo. Son fils est excellent au cornet.
Maurice Favier (clarinette et sax ténor), Michel Sénac (clarinette), Henri Renard (batterie), Gilbert Levannier (tuba),
Excellent tubiste, et chef de musique à La Machine puis Périgueux. Nous avons créé avec lui «Jazz d’ocazz»
Guy Martin (clarinette),
Aujourd’hui décédé c’était un de mes bons copains. J’avais déjà joué avec lui dans l’orchestre de Jean-François Béchon (trompette) dans le début des années soixante, quand j’étais à l’école normale.
le bon chanteur et guitariste Jean-Marc Maurice... et d’autres occasionnels.
Parmi lesquels Jacky Wiollot (cornet), Chalot (trombone) Claude Degemac (piano), Frasson-Cochet (saxes ténor et soprano) Jean Bazzola (piano), « Jeff » Tronelle (contrebasse) Joël Laforet (trompette), Michel Luzy (clarinette) et tant d’autres dont je revois les visages et dont j’ai oublié les noms.
Il est nécessaire de souligner maintenant le rôle important de Bruno Chatard, tromboniste de formation classique, dans la création d’un big band en septembre 1980, dont il a été la cheville ouvrière et qu’il a dirigé de 1983 à 1989. Ce grand orchestre empruntait son répertoire à Woody Herman ou Duke Ellington mais surtout à Count Basie et je peux dire qu’il avait fière allure. Bruno Chatard dirigera également à un moment donné le quartette moderne « Léopard ».
Ainsi, en 1985, date qui marque peut-être un sommet, le Jazz Club Moulinois comptera jusqu’à mille membres dont quatre-vingt musiciens, inclus dans des groupes de niveau et encadrés par des adhérents à vocation pédagogique,
Pour ma part j’ai présenté deux fois une histoire du Jazz (dont une fois avec sept spectateurs !) illustrée d’enregistrements d’anthologie. Il y eut aussi des séances d’initiation au blues, en particulier. Et puis des stages (par Philippe Duchemin (piano) et Christiane Legrand pour le chant.
comme Jean-Pierre Thomas, Bruno Chatard, Jean-Pierre Rougeron, sans oublier Jean Bazzola, pianiste, si je ne me trompe. Une convention signée avec l’inspecteur d’Académie de l’Allier permettait au J.C.M. de faire des animations dans les établissements scolaire
Avec Jean Bazzola, Jean-Pierre Thomas et « Pix » nous avons présenté quelques facettes du jazz à Neuvy (au lycée agricole), au lycée Banville, au lycée de Vichy, à Montluçon aussi et dans des tas d’écoles primaires (Saint-Ennemond, Gannay-sur-Loire, Molinet, Saint-Pourçain, Diou, Dompierre... etc.)
et le dit Jazz Club disposait de deux émissions hebdomadaires sur deux radios locales.
Sur « Radio-Bocage » j’ai présenté, pour ma part, la vie de Sidney Bechet en 24 séquences d’un quart d’heure, la clarinette dans le jazz New Orleans en six séquences et le sax alto dans les big-band en quatre séquences, si je me souviens bien. Nous fîmes aussi un concert sur « Radio bocage » en février 1984.
L’année se terminait toujours par une grande soirée très conviviale, avec des invités de marque comme Marcel Zanini, les Haricots Rouges ou encore Maxim Saury. Ajoutez à cela que tous les musiciens payaient leur cotisation et refusaient le remboursement de leurs frais de déplacement !
Remboursement du prêt pour les travaux de la cave oblige !
Actuellement, après un certain déclin, dû au décès de Michel Poix et au départ pour raisons professionnelles de Bruno Chatard, le Jazz Club Moulinois est en pleine renaissance. Une équipe renouvelée s’est mise en place. La cave a été entièrement refaite grâce au dévouement de Jean-Pierre Philippon (pianiste et président), de Guy Cordelier (batteur), de « l’ancien » Jean-Marc Maurice et du trésorier André Philippon. L’accueil à Moulins est toujours chaleureux et satisfait les professionnels de passage. (…NDR : j’ai coupé un passage faisant l’éloge des « Gigolos », invités du club en 1998 et de la programmation de cette année…) On le voit, la nouvelle équipe mise sur l’éclectisme, en ménageant au style traditionnel la part importante qui est la sienne dans l’histoire du jazz.
Moulins n’est qu’une petite ville d’un peu plus de vingt mille habitants, mais combien de grandes cités pourraient prendre modèle sur elle, pour peu qu’elles soient animées du même désir de donner au jazz la place qui lui revient dans la culture du 20ème siècle. Souhaitons au Jazz Club Moulinois d’avoir toujours la foi, la persévérance et la réussite.
Jean Vastra
J’ai des cassettes de ces divers évènements, mais dans un état déplorable et puis ce sont des témoignages impitoyables sur le niveau disons très moyen des formations du club et on peut dire que sa réputation dépassait à l’époque largement son niveau musical ! J’ai cependant deux ou trois cassettes dont les participants n’ont pas à rougir. Il existe deux cassettes vidéo : celle de FR3 auvergne déjà citée et une autre filmée à Vichy avec «Jazz d’occazz» (en 1991), mais je n’ai jamais pu les avoir. (Françoise Cholet avait celle de Vichy, qui n’est pas mal). Enfin je crois que Maurice Favier et Michel Blot ont quelques extraits filmés de nos prestations avec le groupe jazz traditionnel.